Ce vendredi 6 juin, la France, avec à ses côtés les
représentants des Nations réconciliées, commémore le 70ème anniversaire du
débarquement sur les côtes de Normandie. Débarquement qui, faut-il préciser,
aura été un facteur déterminant dans l’issue de la seconde guerre mondiale. A
travers une cérémonie dont le caractère grandiose est des plus légitimes,
François Hollande et le peuple français voudraient tout d’abord saluer la
mémoire de tous ceux qui, politiques et combattants, avaient contribué à ce
débarquement historique. Mais au-delà de la France, le monde entier voudrait, à
travers cette commémoration, implorer la sagesse humaine, pour que l’humanité ne
revive plus les horreurs et la barbarie que la Terre a enregistrées entre 1939
et 1945. Sauf qu’il y a une absent sur la liste des invités : L’Afrique.
Pas de représentants de l’UA, de chefs d’Etat ou d’anciens combattants en
provenance de l’Afrique. En soi, c’est là une négation du sacrifice que les
Africains ont consenti pour que le débarquement et, plus globalement, la
victoire alliée soit possible. Mais ils n’en sont pas à leur première !
Naturellement, si l’on considère uniquement ce qui s’est
passé à la date du 6 juin, on pourrait ne pas voir l’éminent rôle qui a été
celui de l’Afrique et des Africains dans la victoire des forces alliées. Si
l’on se met dans cette perspective des plus étroites, on comprendrait que
Barack Obama, la Reine Elisabeth II ou encore Stephen Harper soient à la
première loge. De ce point de vue, on comprendrait même que les ennemis d’hier
que sont notamment l’Allemagne, l’Italie, etc soient également conviées.
De ce point de vue donc, même la venue du turbulent Vladmir
Poutine ne saurait surprendre. Et c’est décidément ainsi que les organisateurs
de la cérémonie d’aujourd’hui perçoivent les choses. Autrement, l’Afrique
aurait au moins été représentée parmi les 800 vétérans étrangers attendus.
Malheureusement, aucun tirailleur ne sera du rendez-vous. Ils ont été oubliés.
Comme ils l’ont été toujours été, du reste.
De la part de la France et du monde, c’est une ingratitude
flagrante à l’égard du continent
africain. Parce qu’en effet, s’il est vrai que les Africains n’ont peut-être
pas fait partie des troupes qui ont débarqué en Normandie, par contre, ils
étaient là durant tout le processus qui a précédé ce jour historique. L’Afrique
était notamment là, servant d’assise territoriale et de cadre de
repositionnement pour les forces alliées. Si elles n’avaient pas eu l’Afrique
comme base arrière, les puissances alliées auraient certainement souffert de
l’occupation du canal de suez par l’Italie,
ou après que les Japonais aient occupé les territoires asiatiques.
Or, l’implication du continent berceau de l’humanité ne
s’était point limitée à l’utilisation de ses ports et aéroports. Elle a
également contribué à l’effort de guerre en y envoyant ses braves fils et en
donnant de ses immenses richesses. A propos, des historiens estiment qu’entre 1940
et 1944, ce sont quelques 169. 000 combattants qui furent mobilisés dans
l’Ouest africain britannique. Pour ce qui est des colonies françaises, les
mêmes auteurs estiment à 80.000 le
nombre de combattants mobilisés dans le cadre des campagnes de “ la France
libre ”. Une bonne partie ne sont jamais revenus du front.
L’Afrique fut également sollicitée pour participer aux
dépenses militaires. C’est ainsi qu’outre les contributions en nature,
l’investissement de l’empire colonial britannique est évalué par les historiens
à 931.127 livres dont 44 % provenant du Nigeria, 38 % de la Gold Coast (actuel
Ghana), 16 % de Sierra Leone et 1,2 % de Gambie. Rejoignant le conflit aux
côtés des alliés, la Belgique va également favoriser l’exploitation du cuivre
et de l’uranium congolais. Côté français, les statistiques officielles situent
à 1.508 millions de FF la contribution totale de l’empire colonial africain à
l’effort de guerre.
Comme on le voit donc, contrairement à ce qui est incarné
dans la cérémonie de ce jour en Normandie, la contribution africaine à la
victoire contre l’Allemagne nazie n’est pas des moindres. L’Afrique a offert
son sol comme champ de bataille, ses fils comme combattants et ses avoirs comme
contributions financières. Mais 70 ans après, on fait comme si elle n’avait
rien fait. C’est à croire que l’objectif est de falsifier l’histoire, en
gommant la partition que les Africains y ont jouée. Décidément, Nicolas Sarkozy
n’est peut-être pas le seul à penser que « l’Afrique n’est pas assez entrée dans
l’histoire » !!! En vérité, certains maîtres à penser tiennent toujours à la
''débarquer'' de l'Histoire. Mais, ça c'est une autre histoire ?!?